Charles Laughton et Walter Pidgeon |
L’Exercice d’Etat de Pierre Schoeller, La Conquête de Xavier Durringer et Les Marches du pouvoir de George Clooney, autant de films sortie cette année, qui s’intéresse de prés ou de loin, à la face intime de la politique. L’occasion idéale pour actualiser le passé et s’intéresser à la pierre angulaire de ce cinéma dit politique - expression maladroite, car au premier sens du terme, de nombreux films relèvent de la vie en société - : Tempête à Washington de Otto Preminger.
Chose peu commune au cinéma hollywoodien, Advise and Consent (nom original du film) surprend au premier abord par sa densité scénaristique. Malgré la présence de vedettes comme Charles Laughton et Henry Fonda, la percée individuelle se dilue à travers la vision globale du cinéaste, propre à la description mécanique de ce système, qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler The Social Network de David Fincher.
Rien n’est ni blanc, ni noir dans le monde cloisonné de Preminger. C’est plutôt une masse grisonnante de perfection sur laquelle Preminger ne cesse d’actualiser jusqu’au moment où il trouve l’image hors connexion. Et cela vaut autant pour le candidat au poste de Secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères capable de s’asseoir sur des convictions idéalistes, dans l’optique d’accéder au pouvoir avec l’image la plus nette qui soit, que pour le sénateur Brigham prêt à mettre fin à ses jours pour éviter qu’on découvre son homosexualité refoulée. Si bien qu’il est difficile de cacher son angoisse devant ces hommes politiques repoussant l’imperfection comme s'ils avaient affaire à leur pire ennemi. Et ceci, quelques années après avoir combattu en Europe la perfection, soit le fascisme.
Là où la majeure partie du cinéma hollywoodien fait appel à des artifices pour nous effrayer, Preminger tout comme Fritz Lang sur Les Bourreaux meurent aussi, analyse froidement et cliniquement la société telle qu’elle est, c’est à dire créatrice de victimes : Brigham et le candidat subissent le puritanisme ambiant.
A cet égard, la distance imposée entre le réalisateur et son sujet laisse penser à croire que Preminger côtoie un fascisme opaque, qu’il ne condamne pas, par peur de se condamner lui-même. Sa place est celle d’un observateur attentif, et toujours à l’affut du moindre écart.
Tifenn Jamin
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