lundi 2 janvier 2012

Take Shelter de Jeff Nichols

Auteur d'un premier film d'une rigueur classique admirable, Jeff Nichols persévère et signe un deuxième essai où cinéma de genre peut encore rimer avec prendre le temps de raconter une histoire

Si il y a bien une tâche à laquelle doit faire face le critique, c’est bien de reconnaitre l’auteur derrière l’apparente banalité d’un film. A l’instar de Time Out sorti l’année dernière, Take Shelter fait clairement partie de ces films marqués par une volonté de s’effacer derrière son sujet et ceci au détriment d’une certaine tendance soporifique du cinéma de genre,prônant l’excitation visuelle.


Shotgun Stories, le premier film de Jeff Nichols avait pour cadre un drame familial miné par « l’hérédité des instincts » et « l’hérédité de la fêlure » qu’avait reconnu Gilles Deleuze en lisant Zola. On était partagé entre le cachet indé du film (dont la musique en est - toujours - le symbole) et la filiation un peu trop appuyée au cinéma de John Ford. Take Shelter se défait de ses coquilles et gagne en limpidité. D’où cette impression d’être sur un film sous tension, qui ne lâche jamais son récit.

Curtis est un homme ordinaire, possédant un domaine privé, aimé  par une épouse ordinaire, père d’une fille ordinaire et pour couronner le tout, salarié dans une entreprise ordinaire. De ce postulat fondamental, Jeff Nichols va s’évertuer à pervertir le quotidien de la famille en infligeant à son protagoniste, un déséquilibre à première vue fantastique avant d’amener son récit vers la fable sociale et l’hérédité récurrente de son cinéma. Mais cette fois-ci, cette hérédité a quelque chose de plus global, lié sans aucun doute à cet axiome dévastateur «  en temps de crise, il faut se serrer la ceinture » propulsant le film vers une métaphore prémonitoire de la crise actuelle, créatrice de folie, sans pourtant affirmer cette hypothèse et laissant le champ libre à l’interprétation finale. Un récit qui rappelle Shyamalan et ses cliffhangers efficaces sans pourtant tomber dans les excès de ce dernier.

Loin d’être un cinéaste commun, Nichols a pour morale, une rigueur qui se retranscrit sur tous les plans, cherchant le moment juste pour déclencher les dérives fantastiques ainsi que les crises bien réelles du personnage à l’image de cette scène ou Michael Shannon entreprend à lui tout seul un remake de Bug, dans lequel il jouait pour Friedkin. Nombreux sont ses acmés tellement bien dosées qu’on ne se sent pas une seule fois expulsé par un hypothétique excès au point qu’il est absolument tragique d’assister au démantèlement  progressif de cette famille qui n’a pas le droit à l’erreur.
 

                                                                                      Tifenn Jamin


2 commentaires:

  1. Père d'un garçon ordinaire???
    Plutôt une fille atteinte de surdité non?
    à se demander si vous avez vraiment vu le film, ce qui est dommage pour quelqu'un qui se prétend critique !!!

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  2. Merci pour ce commentaire. ça évitera que je dise des conneries. J'ai vu ce film à Deauville, il y a quelques mois mais ça n'excuse en rien ses lacunes

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