dimanche 6 mars 2011

Transversale : Jimmy Rivière vs Fighter

Le 9 mars prochain sortiront deux films aux résonances communes : Jimmy Rivière de Teddy Lussi-Modeste et Fighter de David O. Russell. Hasard du calendrier ou simple élucubration personnelle ? Je vous laisse le soin de trancher cette question qui mérite tout de même d’être posée pour plusieurs raisons :

Jimmy Rivière
1) Chacun des deux films nous raconte le parcours d’un homme déchiré entre son désir d’indépendance - figuré par la boxe - et par ses origines familiales de plus en plus étouffantes. De ce dilemme, Jimmy Rivière en fait sa colonne vertébrale alors que dans Fighter, c’est un thème parmi d’autres. Il n’est donc pas surprenant de voir le premier film travailler cette thématique avec beaucoup plus de nuances, ce que ne fait visiblement pas Fighter, qui préfère jouer la carte de la condensation thématique à grands renforts de cadrages trop démonstratifs. Une tendance qui ne cesse de miner le cinéma américain de ces derniers mois. Teddy Lussi-Modeste semble avoir retenu la leçon de Fritz Lang sur la nécessité dramatique : tous les changements de plan servent le récit ; la scène du baptême est en la preuve. De ce fait, on sent ce climat oppressant, à l’image de ce que peut ressentir Jimmy. Fighter part dans plusieurs directions à la fois : le dilemme de Micky, sa relation amoureuse, le constat social et la dépendance à la drogue de son frère – ce qui révèle, soit dit en passant, que la toxicomanie est la fausse-bonne idée du cinéma des années 90 : Requiem for a Dream et Trainspotting sont des films surestimés. On peut voir Jimmy Rivière comme un exemple à suivre dans la mesure ou il est préférable d'explorer un seul sujet que de suivre plusieurs chemins. Préférons la modestie des premiers films à la prétention des machines à oscars : Black Swan, Le Discours d’un roi et 127 heures.

Fighter
2) La question du réel anime les deux films. Fighter joue sur les apparences en croyant que mélanger des styles documentaires et télévisés permet de gagner en crédibilité. J’avoue être complètement réticent à ce genre de procédé trop souvent artificiel et indigeste. Autre défaut de taille, on a le droit à l’énième carton annonçant fièrement « d’après une histoire vraie » comme s'il fallait absolument reprendre le récit d’une vie dans sa totalité. Le cinéma n’est t-il pas l’art de la sélection ? Prendre un instant particulier et lui donner un caractère universelle. Ce carton sera cité dans le générique avec les deux frères à l’origine du film remerciant Hollywood de les avoir mis en scène. Juste ignoble. Tout le contraire de Teddy Lussi-Modeste : « J'ai toujours fait le choix de la fiction contre le documentaire. Tout simplement parce que le documentaire n'est pas mon regard. Je n'ai rien contre le documentaire, ni contre l'immixtion du documentaire dans la fiction. » Avec ces propos recueillis lors d’une interview, on peut se rendre compte à quel point le réalisateur a confiance dans le récit et, du coup, dans son scénario. Il ne cherche pas la facilité de l'apparence mais la profondeur des personnages qui sont les seuls à pouvoir augmenter le réel.

Conclusion : en partant de simples analogies, on observe que ce sont au bout du compte des antagonismes qui ressortent. Ce qui n’empêche pas de voir des ponts se dresser entre ces deux films.


Tifenn Jamin
  Un grand merci à l'homme de l'ombre ; Paul

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